21. L'abbreviation
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L'abréviation. Le français parlé qui de tout temps a répugné aux mots trop longs continue à les abréger, surtout lorsque l'aspect en révèle l'origine savante. Cette tendance à l'abréviation s'est considéra¬blement accrue depuis la fin du XIXe siècle.
On distingue différents types d'abréviations. Parmi les plus fréquen¬tes sont les troncatures telles que amphi[théâtre] - « salle de cours ». auto[mobile], cyclo [moteur], baro[mètre], dactylo [graphe], kilogram-me], loco [motive], métropolitain], micro[pnone], phono[graphe], photo [graphe], polio [myélite], stéréo [phonique], télévision] (f), télé-[viseur] (m), taxi[mètre], vidéo[phonie] qu'on forme en laissant tomber le deuxième élément d'un mot composé. Ces formations apparues dans le parler du peuple de Paris pénètrent de plus en plus dans la langue littérai¬re.
Ce mouvement est allé encore plus loin : on rejette une ou plusieurs dernières syllabes sans se soucier de ce que ces syllabes représentent ou non un morphème. L'abréviation s'effectue même lorsque les syllabes retranchées paraissent être indissolublement liées au corps même du mot af[faire], anar[ chiste], accu[mulateur], bac[calauréat], collabo[rationniste], aéb[utante]- « jeune fille qui débute dans la vie mondaine ». puis « très jeune fille ». édito[rial], écolo[giste], fac[ulté], fortif[ication], imper[méable], labo[ratoire], lino[léum], manif[estation], para[chutiste], philo[sophie], réac[tionnaire], sana[torium], frigo[rifique], hebdo[madaire], provo[cateur,-cation], pub[licite], rétro[grade], réac[tionnaire], l'Huma[nité] et même Saint-Êx (Saint-Exupéry).
Parfois on remplace ces syllabes retranchées par un -o final qui re¬présente un pseudo-suffixe populaire : anarcho < anarchiste, apéro < apéritif, camaro < camarade, convalo < convalescent, mécano < mécani¬cien, métallo < métallurgiste, Montparno < Montparnasse, pharmaco < pharmacien, populo < populaire, prolo < prolétaire, proprio < proprié¬taire.
Généralement on réduit le mot par l'ablation des syllabes finales (ap o -cope), toutefois l'ablation des syllabes initiales (aphérè se) est possi¬ble : pitaine < capitaine, cipal < (garde) municipal, Ricain < Américain : signalons aussi chandail formé de marchand d'ail.
Un tout autre type d'abréviations est représenté par les sigles, c'est-à-dire des mots formés par la prononciation des lettres ou des syllabes initiales des composants de quelque locution, par exemple : C.G.T. -« Confédération générale du travail », P.C.F. - « Parti communiste fran¬çais ». O.N.U. - « Organisation des nations unies ». P.N.B. - « Produit national brut », R.E.R. - « Réseau Express Régional ». R. T.F. - « Radio-diffusion -télévision française ». S.N.C.F. - « Société nationale des che¬mins de fer français », I. G.A.M ou igame - « Inspecteur général en mission extraordinaire », Z.U.P. - « Zone à urbaniser en priorité ». D.C.A. -« Défense contre avions ». T.G. V. - «Train à grande vitesse ». E.N.A. -« École nationale d'administration », C.A.P.E.S. - « Certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement secondaire. D.E. U.G. - «Diplôme d'étu-des universitaires générales » qui sanctionne le premier cycle de l'ensei¬gnement supérieur en France : BD - « Bande dessinée ». GR - « (sentier de) Grande randonnée », OVNI - « Objet volant non identifié », HLM-« Habitation à loyer modéré ». PDG - « Président - directeur général ». S.F. - « Science-fiction ». ORL - « Oto-rhino-laryngologue ». Bénélux -Belgique. Néerlande (Pays-Bas). Luxembourg. TOM - « Territoires d'Outre-Mer ».
Les abréviations de ce genre sont généralement des tenues diffé¬rents. La vitalité de certaines de ces formations se manifeste par le fait qu'elles servent de base à de nouvelles créations, par exemple : cégétiste - « membre de la C.G.T. », igamie - « circonscription comprenant plu¬sieurs départements et administrée par un igame », onusien - « membre de l'O.N.U. », zupéen, -ne - « habitant d'une Zup », énarque - « ancien élève de l'E.N.A », capésien - « étudiant, professeur titulaire du C.A.P.E.S. ».
La création de sigles est une des tendances les plus accusées du fran¬çais actuel qui s'est surtout manifestée à partir de la deuxième moitié du XXe siècle. Il arrive que les sigles deviennent un handicap au cas où l'on doit les décoder. Nous citerons à l'appui les paroles de G. Molinié : « Une institution à siglaison étrangère comme l'UNESCO verra peu d'indivi¬dus capables de développer en clair l'énumération des mots dont on a la suite d'initiales : United Nations Educational Scientific andCultural Or¬ganisation, ce qui n'empêche pas, ajoute-t-il, de savoir très bien (c'est-à-dire très en gros) de quoi on parle » [31, p.55].
Ce n'est qu'avec une certaine réserve qu'on peut ranger l'abrévia¬tion parmi les procédés de formation. Par l'abréviation on ne forme pas tant des mots nouveaux que des variantes, généralement des variantes stylistiques de mots existants. Si métro, auto, cinéma, stylo, dactylo ont effectivement enrichi le français en triomphant de leurs formes complètes initiales, prof, récré, perme, colon, expo ne sont que des variantes stylis¬tiques de professeur, récréation, permission, colonel, exposition. Il en est de même pour les sigles qui présentent « les doubles » des locutions correspondantes.
Les défenseurs du bon style s'opposent à l'emploi abusif de l'abré¬viation1 surtout lorsqu'on mutile des mots authentiquement français d'un emploi commun qui ont subi l'épreuve du temps (cf. : colon - pour « co-lonel », couverte pour « couverture »
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L'abréviation. Le français parlé qui de tout temps a répugné aux mots trop longs continue à les abréger, surtout lorsque l'aspect en révèle l'origine savante. Cette tendance à l'abréviation s'est considéra¬blement accrue depuis la fin du XIXe siècle.
On distingue différents types d'abréviations. Parmi les plus fréquen¬tes sont les troncatures telles que amphi[théâtre] - « salle de cours ». auto[mobile], cyclo [moteur], baro[mètre], dactylo [graphe], kilogram-me], loco [motive], métropolitain], micro[pnone], phono[graphe], photo [graphe], polio [myélite], stéréo [phonique], télévision] (f), télé-[viseur] (m), taxi[mètre], vidéo[phonie] qu'on forme en laissant tomber le deuxième élément d'un mot composé. Ces formations apparues dans le parler du peuple de Paris pénètrent de plus en plus dans la langue littérai¬re.
Ce mouvement est allé encore plus loin : on rejette une ou plusieurs dernières syllabes sans se soucier de ce que ces syllabes représentent ou non un morphème. L'abréviation s'effectue même lorsque les syllabes retranchées paraissent être indissolublement liées au corps même du mot af[faire], anar[ chiste], accu[mulateur], bac[calauréat], collabo[rationniste], aéb[utante]- « jeune fille qui débute dans la vie mondaine ». puis « très jeune fille ». édito[rial], écolo[giste], fac[ulté], fortif[ication], imper[méable], labo[ratoire], lino[léum], manif[estation], para[chutiste], philo[sophie], réac[tionnaire], sana[torium], frigo[rifique], hebdo[madaire], provo[cateur,-cation], pub[licite], rétro[grade], réac[tionnaire], l'Huma[nité] et même Saint-Êx (Saint-Exupéry).
Parfois on remplace ces syllabes retranchées par un -o final qui re¬présente un pseudo-suffixe populaire : anarcho < anarchiste, apéro < apéritif, camaro < camarade, convalo < convalescent, mécano < mécani¬cien, métallo < métallurgiste, Montparno < Montparnasse, pharmaco < pharmacien, populo < populaire, prolo < prolétaire, proprio < proprié¬taire.
Généralement on réduit le mot par l'ablation des syllabes finales (ap o -cope), toutefois l'ablation des syllabes initiales (aphérè se) est possi¬ble : pitaine < capitaine, cipal < (garde) municipal, Ricain < Américain : signalons aussi chandail formé de marchand d'ail.
Un tout autre type d'abréviations est représenté par les sigles, c'est-à-dire des mots formés par la prononciation des lettres ou des syllabes initiales des composants de quelque locution, par exemple : C.G.T. -« Confédération générale du travail », P.C.F. - « Parti communiste fran¬çais ». O.N.U. - « Organisation des nations unies ». P.N.B. - « Produit national brut », R.E.R. - « Réseau Express Régional ». R. T.F. - « Radio-diffusion -télévision française ». S.N.C.F. - « Société nationale des che¬mins de fer français », I. G.A.M ou igame - « Inspecteur général en mission extraordinaire », Z.U.P. - « Zone à urbaniser en priorité ». D.C.A. -« Défense contre avions ». T.G. V. - «Train à grande vitesse ». E.N.A. -« École nationale d'administration », C.A.P.E.S. - « Certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement secondaire. D.E. U.G. - «Diplôme d'étu-des universitaires générales » qui sanctionne le premier cycle de l'ensei¬gnement supérieur en France : BD - « Bande dessinée ». GR - « (sentier de) Grande randonnée », OVNI - « Objet volant non identifié », HLM-« Habitation à loyer modéré ». PDG - « Président - directeur général ». S.F. - « Science-fiction ». ORL - « Oto-rhino-laryngologue ». Bénélux -Belgique. Néerlande (Pays-Bas). Luxembourg. TOM - « Territoires d'Outre-Mer ».
Les abréviations de ce genre sont généralement des tenues diffé¬rents. La vitalité de certaines de ces formations se manifeste par le fait qu'elles servent de base à de nouvelles créations, par exemple : cégétiste - « membre de la C.G.T. », igamie - « circonscription comprenant plu¬sieurs départements et administrée par un igame », onusien - « membre de l'O.N.U. », zupéen, -ne - « habitant d'une Zup », énarque - « ancien élève de l'E.N.A », capésien - « étudiant, professeur titulaire du C.A.P.E.S. ».
La création de sigles est une des tendances les plus accusées du fran¬çais actuel qui s'est surtout manifestée à partir de la deuxième moitié du XXe siècle. Il arrive que les sigles deviennent un handicap au cas où l'on doit les décoder. Nous citerons à l'appui les paroles de G. Molinié : « Une institution à siglaison étrangère comme l'UNESCO verra peu d'indivi¬dus capables de développer en clair l'énumération des mots dont on a la suite d'initiales : United Nations Educational Scientific andCultural Or¬ganisation, ce qui n'empêche pas, ajoute-t-il, de savoir très bien (c'est-à-dire très en gros) de quoi on parle » [31, p.55].
Ce n'est qu'avec une certaine réserve qu'on peut ranger l'abrévia¬tion parmi les procédés de formation. Par l'abréviation on ne forme pas tant des mots nouveaux que des variantes, généralement des variantes stylistiques de mots existants. Si métro, auto, cinéma, stylo, dactylo ont effectivement enrichi le français en triomphant de leurs formes complètes initiales, prof, récré, perme, colon, expo ne sont que des variantes stylis¬tiques de professeur, récréation, permission, colonel, exposition. Il en est de même pour les sigles qui présentent « les doubles » des locutions correspondantes.
Les défenseurs du bon style s'opposent à l'emploi abusif de l'abré¬viation1 surtout lorsqu'on mutile des mots authentiquement français d'un emploi commun qui ont subi l'épreuve du temps (cf. : colon - pour « co-lonel », couverte pour « couverture »